Coronavirus : foire aux questions des Prêts Garantis par l’Etat

L'actu du CHRD — 3 avril 2020

Dans le prolongement d’un précédent article relatif à la mise en place des prêts garantis par l’état (PGE), BPIFrance et la Fédération Bancaire Française (FBF) viennent de publier une foire aux questions.

Ce document apporte des réponses précises à près de 40 questions pratiques sur les entreprises éligibles au dispositif, la procédure d’octroi du prêt garanti par l’Etat, les caractéristiques du prêt et de la garantie apportée.

Ce document précise notamment que :

– Les banques s’engagent à octroyer très largement le prêt garanti par l’Etat dans un délai de 5 jours à compter de la réception d’un dossier simplifié, pour toutes les entreprises dont le chiffre d’affaires est inférieur à 10 M€ et qui ne présentent pas de difficulté financière (notations de 3++ à 5+), soit 85% des entreprises en France ;

– Les banques s’engagent pour tous les autres professionnels et entreprises à examiner attentivement, au cas par cas, leur demande ;

– Les banques s’engagent également à examiner avec attention les demandes formulées par des professionnels, TPE et PME assurant des services de proximité, notamment dans le commerce et l’artisanat ;

– En cas de décision négative, le professionnel ou l’entreprise peut s’adresser à la médiation du crédit de son ressort.

Nous avons sélectionné les principaux éléments de cette FAQ.

– Les textes prévoient comme critère d’exclusion le fait pour une entreprise de faire l’objet d’une des procédures visées aux titres II (sauvegarde), III (redressement), IV (liquidation) du livre VI du code de commerce. A quelle date cette situation doit-elle s’apprécier ? Cela veut-il dire que les entreprises en cours d’exécution de leur plan sont exclues du dispositif ?

La loi et l’arrêté précisent qu’une entreprise ne peut pas être éligible au dispositif si elle fait l’objet d’une procédure collective (sauvegarde, redressement et liquidation judiciaires). Il convient d’apprécier cette situation à la date de publication de la loi et de l’arrêté au Journal Officiel, le 24 mars 2020.

En outre, ce critère ne vaut que jusqu’à « clôture de ladite procédure », ce qui doit être compris comme ayant pour conséquence de ne pas exclure une entreprise qui est en cours d’exécution d’un plan de sauvegarde ou de redressement au 24 mars 2020 ; ces dernières sont donc bien éligibles au dispositif.

Enfin, les entreprises en procédure préventive amiable (mandat ad hoc, conciliation) ne sont pas visées par cette exclusion ; elles sont donc bien éligibles au dispositif. Il en va de même pour les entreprises en médiation. Cela étant, il convient de noter le lien avec la situation financière qui souvent, pour les entreprises dans ces situations, est déjà dégradée et peut justifier, au cas par cas, des décisions négatives d’octroi par les banques de nouveaux prêts garantis par l’Etat.

– Les entreprises unipersonnelles, sans salariés, sont elles éligibles au PGE ?

Oui.

– Puis-je cumuler le bénéfice d’un prêt garanti par l’Etat (PGE) avec d’autres dispositifs d’aide ?

Oui. Il n’y aucune contrainte sur le cumul du bénéfice d’un PGE avec d’autres aides élaborées par les pouvoirs publics français dans la décision ou dans le cadre temporaire de la Commission européenne.

– Quel est le périmètre précis des associations et fondations éligibles ?

Toute association ou fondation qui est enregistrée au RNEE, qui emploie un salarié ou paie des impôts ou perçoit une subvention publique, est éligible.

– Pour les dossiers avec une cotation Banque de France plus mauvaise que 5+, la garantie ne serait acquise qu’après analyse et décision de la banque ? De BPI ? Qu’en est-il réellement ? Y a-t-il un lien entre l’éligibilité d’une entreprise au PGE et sa cotation Banque de France / FIBEN ?

Pour tous les dossiers d’entreprises qui, en France, emploient moins de 5 000 salariés et réalisent moins de 1,5 milliard d’euros de chiffre d’affaires, seule la banque prêteuse analyse le dossier et décide du prêt. Si la banque accorde le prêt, et que ce prêt est conforme au cahier des charges défini par arrêté (25% du CA HT max,…), alors il est de droit garanti par l’Etat. Ni l’Etat ni BPI ne conduisent donc d’analyse du dossier derrière la banque prêteuse.

Même si aucun critère de notation n’est fixé dans le cahier des charges, les banques se doivent d’y être attentives dans la mesure où elles partagent le risque : elles ne sont pas intégralement couvertes par la garantie de l’Etat sur le crédit, et pour les professionnels, TPE, PME et ETI, elles ne peuvent pas prendre d’autre garantie ou sureté en plus de la garantie de l’Etat à 90%. Dans ce contexte, il faut s’attendre à ce qu’elles acceptent de prêter moins systématiquement à des entreprises dont la cotation (Banque de France ou équivalente) serait de 5 ou plus qu’à des entreprises mieux notées.

En cas de refus, l’entreprise peut se rapprocher d’autres banques ou se rapprocher de la médiation du crédit de son ressort.

En outre, d’autres dispositifs de trésorerie sont accessibles aux professionnels et entreprises qui ne seraient pas éligibles au prêt garanti par l’Etat ou qui se le verraient refusé par la banque. En cas de refus d’un prêt garanti par l’Etat, les professionnels et les TPE peuvent notamment déposer une demande auprès du fonds de solidarité.

– Que signifie le terme « cotation Banque de France?

La cotation de la Banque de France est une appréciation sur la capacité d’une entreprise à honorer ses engagements financiers à un horizon de un à trois ans. Cette cotation est composée de deux éléments : la cote d’activité et la cote de crédit.

La cote d’activité exprime  le niveau d’activité de l’entreprise. Dans la très grande majorité des cas, ce niveau est fonction du chiffre d’affaires (cf diagramme ci-dessous exprimé en millions d’euros).

Cote Niveau d’activité
A ≥ 750
B 150 ≤ B < 750
C 50 ≤ C < 150
D 30 ≤ D < 50
E 15 ≤ E < 30
F 7,5 ≤ F < 15
G 1,5 ≤ G < 7,5
H 0,75 ≤ H < 1,5
J 0,50 ≤ J < 0,75
K 0,25 ≤ K < 0,50
L 0,10 ≤ L < 0,25
M < 0 ,10
N Non significatif
X Le chiffre d’affaires n’est pas connu de la Banque de France

La cote de crédit est elle fondée sur l’examen de la situation financière de l’entreprise et son évolution prévisible après analyse de la rentabilité et de la structure du bilan (appréciation portée sur l’environnement économique de l’entreprise; les entreprises qui lui sont apparentées ou avec lesquelles elle entretient des relations commerciales ou économiques étroites et l’existence d’incidents de paiement-effets ou de procédures judiciaires.).

COTE DE CREDIT

3++ Excellente 6 Très faible
3+ Très forte 7 Au moins un incident de paiement sur effet
3 Forte 7 Au moins un incident de paiement sur effet
4+ Assez forte 8 Menacée
4 Correcte 9 Compromise
5+ Assez faible P En procédure collective
5 Faible O Aucune information défavorable

– Comment accéder à la cotation de mon entreprise et à mon indicateur dirigeant ?

Le service gratuit I-FIBEN permet à chaque dirigeant d’entreprise (y compris entrepreneur individuel), de consulter via internet sur le site https://i-fiben.banque-france.fr,  les informations recensées dans FIBEN le concernant, ainsi que celles relatives aux entreprises qu’il dirige ou dont il est le représentant légal.

Pour accéder à i-FIBEN, il est nécessaire :

  • d’être une personne physique majeure (sauf majeurs protégés) ;
  • d’être recensé actuellement dans la base FIBEN en qualité de représentant légal ou

de dirigeant de personne morale, ou d’entrepreneur individuel ;

  • de disposer d’un compte i-FIBEN.

Attention, l’accès à i-FIBEN requiert que vous vous soyez d’abord présenté dans l’agence de la Banque de France ou de l’Institut d’émission d’Outre-mer dont vous dépendez géographiquement, avec une pièce officielle d’identité et un k-bis récent de l’entreprise. Votre identifiant vous sera remis et un mot de passe provisoire vous sera adressé ultérieurement à l’adresse e-mail que vous aurez communiquée. Vous pourrez ensuite vous connecter.

La liste des agences Banque de France est consultable à l’adresse suivante : https://www.banque-france.fr/la-banque-de-france/nous-connaitre/implantations-de-la-banque

– Que faire si les comptes 2019 certifiés ne sont pas disponibles ? Que se passe-t-il si en pratique, par exemple à la suite d’une erreur, le montant de prêt PGE octroyé dépasse le plafond autorisé ? La garantie continue-t-elle de valoir alors dans la limite du plafond autorisé ou tombe-t-elle en totalité ?

Si les comptes 2019 certifiés ne sont pas disponibles, il est possible d’utiliser une attestation d’expert-comptable / commissaire aux comptes. Si cela n’est pas possible, il convient d’utiliser les comptes 2018 certifiés.

Le chiffre d’affaires (ou la masse salariale selon les cas) qui permet de calculer le montant total par entreprise des prêts pouvant être couverts par la garantie de l’Etat doit s’appréhender comme un plafond et non comme une condition de l’éligibilité. Dès lors, il convient que la portion qui excèderait le seuil des 25% du CA, le cas échéant, ne soit pas couverte par la garantie de l’Etat mais qu’en revanche le prêteur conserve le bénéfice de cette garantie sur le reste du prêt dans la limite du plafond autorisé.

De la même façon, si le chiffre d’affaires (ou le nombre de salariés) qui permet de classer l’entreprise (ou le groupe) emprunteur dans l’une des trois catégories (PME, ETI, Grande Entreprise) pour connaitre la procédure d’octroi applicable, la quotité et le prix de la garantie, s’avère a posteriori erroné, le prêteur conserve bien le bénéfice de cette garantie, mais dans la limite de la quotité découlant de l’application des textes à la situation vérifiée de l’entreprise. Il doit régulariser le versement des primes de garantie s’il y a eu un versement inférieur à ce qui aurait dû l’être.

– Y a-t-il un nombre maximum de demandes au-delà du 30 avril ?

Non. Seul est plafonné le montant total des prêts garantis par l’Etat que peut détenir une entreprise.

– Si une entreprise revient « plusieurs fois » pour demander un nouveau tirage (par exemple en mai en complément d’une première mise en place faite fin mars), le nouveau tirage sera-t-il réalisé de nouveau sur 12 mois créant de ce fait plusieurs échéances courant 2021 ?
Oui. Il s’agit d’un nouveau crédit.

– Pour une SARL créée après le 01/01/2019, dont le gérant est majoritaire donc non salarié, qui n’emploie personne, quel est le montant de PGE auquel il est éligible ?

Le plafond à 25% du chiffre d’affaires doit être considéré comme le cas général. Le recours à la masse salariale pour les entreprises nouvelles ou innovantes est une possibilité laissée par exception au cas général. Dans le cas d’espèce, il convient donc, si cela est plus facile, d’utiliser la référence au chiffre d’affaires, si nécessaire proratisé sur 12 mois.

– Le chiffre d’affaires est-il HT ou TTC ? Peut-on considérer qu’une attestation d’un expert-comptable peut servir de base de calcul ? Faut-il inclure les autres produits d’exploitation ? Peut-on bien prendre en compte le chiffre d’affaires total de l’entité française concernée, et non seulement le chiffre d’affaires que cette entité réalise en France ?

Le chiffre d’affaires est HT.

Il est possible d’avoir recours à une attestation d’expert-comptable en cas d’indisponibilité de comptes certifiés, notamment pour l’année 2019.

Le chiffre d’affaires est celui de la liasse fiscale. Il n’inclut pas d’autres lignes de la liasse fiscale, comme les « autres produits d’exploitation ».

La totalité du chiffre d’affaires de la société immatriculée en France est pris en compte. Il inclut donc le chiffre d’affaires réalisé à l’export, y compris lorsqu’il est réalisé vers une filiale.

– Quel chiffre d’affaires utiliser pour une association ?

Le chiffre d’affaires d’une association est composé du Total des ressources de l’association déduction faite des dons des personnes morales de droit privé et des subventions.

Ce choix permet à l’Etat de ne pas se garantir contre lui-même – il continuera à soutenir les associations – ni contre les choix de collectivités locales qui subventionnent des activités associatives ou de grandes entreprises mécènes qui peuvent et doivent continuer à soutenir le lien social animé par les associations.

– Le recours à la masse salariale pour l’assiette de calcul du montant autorisé pour le prêt pose deux questions : comment s’interprète le « estimée sur les deux premières années d’activité » pour les entreprises créées à compter du 1er janvier 2019 ? Est-ce que la masse salariale est hors charges patronales ?
Pour les entreprises créées à compter du 1er janvier 2019, il convient de calculer la moyenne mensuelle de la masse salariale depuis la création de l’entreprise et de la multiplier par 24 pour obtenir le montant autorisé pour le prêt garanti par l’Etat. La masse salariale à utiliser est la masse salariale brute, donc hors cotisations à la charge de l’employeur.

– Qu’en est-il de l’assurance emprunteur ?

Il est admis que le professionnel ou le dirigeant puisse demander à souscrire une assurance décès. Dans ce cas, afin d’être couvert, le professionnel ou l’entreprise bénéficiaire d’un PGE devra s’acquitter des primes d’assurance, y compris durant la 1ère année de différé.

– Le différé d’amortissement minimal de douze mois empêche-t-il un remboursement anticipé par exemple dans le cas d’une clause de remboursement anticipé obligatoire pour l’emprunteur en cas de changement de contrôle ?

Non. Un remboursement anticipé dans le cas d’une clause usuelle comme le changement de contrôle est possible. Mais l’Etat sera vigilant à ce qu’il n’y ait pas de recours à des clauses abusives qui – à l’encontre de l’intérêt des banques elles-mêmes – viendraient contourner l’option laissée à l’emprunteur à l’issue de la première année de choisir librement d’amortir ou non sur quelques années de plus le prêt.

– La loi et l’arrêté n’encadrent pas le prix des prêts garantis par l’Etat. Quels seront les taux d’intérêt pratiqués par les établissements de crédit qui distribueront le PGE ? Ceux-ci dépendront-ils du nombre d’années sur lesquelles s’exercera l’amortissement du crédit ?

Les banques, par la voix du président de la fédération bancaire française, se sont engagées à octroyer à « prix coûtant » les prêts garantis par l’Etat.

Concrètement, cela veut dire que le taux pour l’emprunteur est le taux dit de la ressource de la banque prêteuse, actuellement proche de 0 % pour la première année, augmenté de la prime de garantie, appliquée au principal du prêt et dont le barème est public et dépend de la taille de l’entreprise ainsi que de la maturité du prêt garanti.

Le coût de la ressource variant d’une banque à l’autre, il se peut qu’il y ait de petites différences de taux sur les prêts garantis par l’Etat d’une banque à l’autre.

– Dans le cas de besoins de financement importants, l’emprunteur peut-il avoir recours à un « club deal » (un seul prêt arrangé par plusieurs banques) ?

Oui. Rien ne s’y oppose. Le prêt devra néanmoins avoir pour caractéristiques celles prévues à l’arrêté et la garantie de l’Etat fonctionnera de la même façon que dans le cas de prêts « bilatéraux ».

– Le plan de remboursement du prêt se discute-t-il avec les banques après le différé de remboursement de douze mois ?

Non. Le prêt doit nécessairement comprendre un différé d’amortissement d’un an et une clause qui donne la faculté à l’emprunteur de décider unilatéralement la durée d’amortissement du prêt à l’issue de la première année, dans la limite de cinq années supplémentaires. Il n’est donc pas possible de demander à l’emprunteur, au moment de l’octroi du prêt, de décider à l’avance d’étendre l’amortissement à l’issue de la première année sur quelques années de plus.

Il est possible d’opérer un remboursement partiel à l’issue de la première année et d’amortir le reste.

Comment interpréter la date limite d’octroi fixée au 31 décembre 2020 ? S’agit-il de la date d’accord de crédit ou de la date de décaissement du prêt ?

La date d’octroi est la date d’accord de crédit. Cela implique que des prêts effectivement accordés avant le 31 décembre 2020 pourront être décaissés postérieurement à cette date tout en pouvant bénéficier de la garantie de l’Etat.

– Sur quelle assiette est calculée la prime de garantie ?

Les primes de garantie s’appliquent au principal du prêt.

– Quand interviendra le prélèvement des primes de garantie de 0,25% ou 0,50% la 1ère année ? Qu’en est-il du coût de la garantie en cas d’exercice par l’entreprise de l’option d’amortissement sur plusieurs années ? S’agira-t-il d’un paiement « flat » ou étalé avec les intérêts bancaires ?

Les commissions de garantie, supportées par l’emprunteur, sont perçues pour la quotité garantie par Bpifrance Financement SA auprès de l’établissement prêteur, au nom, pour le compte et sous le contrôle de l’Etat en une première fois à l’octroi de la garantie, et en une seconde fois, le cas échéant, lors de l’exercice par l’emprunteur de la clause lui permettant d’amortir le prêt sur une période additionnelle calculée en nombre d’années.

En revanche, conformément à la demande de l’Etat visant à ce que l’emprunteur n’ait rien à décaisser la première année, il ne sera pas demandé au professionnel ou à l’entreprise de s’en acquitter sur les 12 premiers mois à compter de la signature : la banque assurera le portage du coût de la garantie sur les 12 premiers mois.

Source : circulaire fiscale UMIH 06-20