Accessibilité : principes et dérogations

Fiches pratiques, L'actu du CHRD — 28 novembre 2014


L’ordonnance du 26 septembre 2014 a été complétée par le décret n° 2014-1326 du 5 novembre 2014 qui modifie les dispositions du Code de la construction et de l’Habitation relatives à l’accessibilité aux personnes handicapées des Etablissements Recevant du Public.

Est paru au journal officiel du jeudi 6 novembre 2014, le décret n° 2014-1326 du 5 novembre 2014 modifiant les dispositions du code de la construction et de l’habitation (CCH) relatives à l’accessibilité aux personnes handicapées des établissements recevant du public et des installations ouvertes au public.

Ce décret prévoit, premièrement, l’introduction d’une réglementation spécifique applicable pour la mise en accessibilité des établissements recevant du public situés dans un cadre bâti existant ainsi que lors de la réalisation de travaux dans ces établissements.

Deuxièmement, il apporte des modifications et des précisions à la procédure de dérogation aux règles d’accessibilité pour motif de disproportion manifeste entre les améliorations apportées et leurs conséquences, prévue à l’article L.111-7-2 du CCH et il introduit un nouveau motif de dérogation pour traiter le cas des établissements situés dans des immeubles d’habitation soumis au régime de la copropriété.

Troisièmement, il modifie la procédure d’autorisation de construire, d’aménager ou de modifier un ERP, pour en réduire le délai et pour préciser, selon les cas, le régime applicable en cas de décision implicite.

I – MISE EN ACCESSIBILITE DES ETABLISSEMENTS RECEVANT DU PUBLIC SITUES DANS UN CADRE BATI EXISTANT

La définition de l’accessibilité
L’article R. 111-19-7 du CCH vient expliquer ce que l’on entend par accessibilité :
« Est considéré comme accessible aux personnes handicapées un établissement recevant du public existant ou créé dans un cadre bâti existant ou une installation ouverte au public existante permettant, dans des conditions normales de fonctionnement, à des personnes handicapées, avec la plus grande autonomie possible, de circuler, d’accéder aux locaux et équipements, d’utiliser les équipements, de se repérer, de communiquer et de bénéficier des prestations en vue desquelles cet établissement ou cette installation a été conçu. Les conditions d’accès des personnes handicapées doivent être les mêmes que celles des personnes valides ou, à défaut, présenter une qualité d’usage équivalente ».

Un arrêté viendra préciser :
– les obligations auxquelles doivent satisfaire les constructions et les aménagements propres à assurer l’accessibilité de ces établissements et de leurs abords,
– la possibilité pour le maître d’ouvrage de satisfaire à ces obligations par des solutions d’effet équivalent aux dispositions techniques de l’arrêté dès lors que celles-ci répondent aux objectifs poursuivis,
– les conditions particulières d’application des règles qu’il édicte lorsque les contraintes liées à la structure du bâtiment l’imposent,
– les obligations particulières auxquelles doivent satisfaire les ERP assis, les établissements disposant de locaux d’hébergement ouverts au public, etc.

Des précisions sur les travaux de modification ou d’extension
Les travaux de modification ou d’extension, réalisés dans les établissements recevant du public existants ou créés dans un cadre bâti existant, doivent être tels que :
– S’ils sont réalisés à l’intérieur des volumes ou surfaces existants, ils permettent au minimum de maintenir les conditions d’accessibilité existantes ;
– S’ils entraînent la construction de surfaces ou de volumes nouveaux à l’intérieur du cadre bâti existant, les parties de bâtiments ainsi créées respectent les dispositions prévues aux articles R. 111-19-7 (l’accessibilité aux personnes handicapées).

Les obligations pour les ERP existants ou créés dans un cadre bâti existant de Vème catégorie
Nous rappelons que les ERP de Vème catégorie sont les Hôtels de moins de 100 personnes et cafés et/ou restaurants de moins de 200 personnes.

Les ERP existants ou créés dans un cadre bâti existant de Vème catégorie doivent satisfaire aux obligations suivantes :
– une partie du bâtiment doit fournir aux personnes handicapées, quel que soit leur handicap, à l’ensemble des prestations en vue desquelles l’établissement est conçu, toutefois, une partie des prestations peut être fournie par des mesures de substitution,
– la partie considérée du bâtiment doit être la plus proche possible de l’entrée principale ou d’une des entrées principales et doit être desservie par un cheminement usuel,
En cas de modification :
– dans les parties du bâtiment rendues accessibles aux règles antérieures au 7 novembre 2014,
– dans les parties de bâtiment qui, situées au même niveau que ces parties accessibles, et contiguës,
l’opération est réalisée en assurant la conformité des éléments du bâtiment aux règles d’accessibilité ; c’est-à-dire pour les personnes handicapées avoir la possibilité :
• de circuler,
• d’accéder aux locaux et équipements,
• d’utiliser les équipements,
• de se repérer,
• de communiquer et de bénéficier des prestations en vue desquelles cet établissement ou cette installation a été conçu.
Lorsque les modifications sont réalisées dans des parties du bâtiment autres que celles visées précédemment, l’opération est réalisée en améliorant l’accessibilité pour les personnes présentant une déficience autre que motrice.

Les obligations pour les ERP existants ou créés dans un cadre bâti autres que la Vème catégorie
Les ERP doivent être rendus accessibles aux personnes handicapés, quel que soit leur handicap conformément aux dispositions de l’arrêté (en attente de parution) ; c’est-à-dire pour les personnes handicapées avoir la possibilité :
• de circuler,
• d’accéder aux locaux et équipements,
• d’utiliser les équipements,
• de se repérer,
• de communiquer et de bénéficier des prestations en vue desquelles cet établissement ou cette installation a été conçu.

Les conditions d’accès des personnes handicapées doivent être les mêmes que celles des personnes valides ou, à défaut, présenter une qualité d’usage équivalente (Art. R. 111-19-7 du CCH).

Toutefois, la conformité des établissements pour lesquels des travaux de mise en accessibilité ont été autorisés avant la date d’entrée en vigueur de l’arrêté (en attente de parution) est appréciée au regard des dispositions antérieures à ce décret relatives à l’accessibilité des ERP.

En cas de modifications ou de renouvellement d’équipements dans ces établissements, l’opération est réalisée en assurant la conformité aux règles d’accessibilité des éléments du bâtiment ou des équipements.

II- LES DEROGATIONS AUX REGLES D’ACCESSIBILITE DES ERP EXISTANTS OU CREES DANS UN CADRE BATI EXISTANT

A/ Les différents cas de dérogation
Les dérogations aux règles d’accessibilité sont accordées par le représentant de l’Etat dans le département, notamment :

1) En cas d’impossibilité technique résultant de l’environnement du bâtiment,
✓ caractéristiques du terrain,
✓ présence de constructions existantes,
✓ contraintes liées au classement de la zone de construction, notamment au regard de la réglementation de prévention contre les inondations ou en raison de difficultés liées à ses caractéristiques ou à la nature des travaux qui y sont réalisés,

2) En cas de contraintes liées à la conservation du patrimoine architectural dès lors que les travaux doivent être exécutés :
→A l’extérieur et, le cas échéant, à l’intérieur d’un établissement recevant du public classé ou inscrit au titre des monuments historiques ou sur un bâtiment situé dans un secteur sauvegardé dont la démolition, l’enlèvement, la modification ou l’altération sont interdits ou dont la modification est soumise à des conditions spéciales en application du b de cet article L. 313-1 ou sur un bâtiment identifié en application du 2o du III de l’article L. 123-1-5 du même code,
→Sur un établissement recevant du public situé :
✓ aux abords et dans le champ de visibilité d’un monument historique classé ou inscrit,
✓ ou dans une aire de mise en valeur de l’architecture et du patrimoine au sens de l’article L. 642-1 du code du patrimoine
✓ ou dans un secteur sauvegardé, lorsque ces travaux sont de nature à porter atteinte à la qualité de ces espaces protégés.

3) Lorsqu’il y a une disproportion manifeste entre les améliorations apportées par la mise en oeuvre des prescriptions techniques d’accessibilité, et
✓ leurs coûts,
✓ leurs effets sur l’usage du bâtiment et de ses abords,
✓ la viabilité de l’exploitation de l’établissement, notamment:
→Lorsque le coût ou la nature des travaux d’accessibilité sont tels qu’ils s’avèrent impossibles à financer ou qu’ils ont un impact négatif critique sur la viabilité économique de l’établissement et que l’existence de cette impossibilité ou de ces difficultés est établie notamment par le dépassement de seuils fixés par arrêté,
→Lorsqu’une rupture de la chaîne de déplacement au sein de l’emprise de l’établissement rend inutile la mise en oeuvre, en aval de cette rupture, d’une prescription technique d’accessibilité pour le ou les types de handicap déterminés.

4) Lors du refus de la copropriété
Lorsque les copropriétaires d’un bâtiment à usage principal d’habitation existant au 28 septembre 2014 réunis en assemblée générale s’opposent, dans les conditions prévues par l’article 24 de la loi n°65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, à la réalisation des travaux de mise en accessibilité d’un établissement recevant du public existant ou créé dans ce bâtiment.

Lorsque ce refus est opposé à un établissement recevant du public existant dans ce bâtiment, la dérogation est accordée de plein droit.

Lorsqu’une dérogation a été accordée sur le fondement de l’impossibilité financière ou l’impact négatif sur la viabilité économique, une nouvelle demande doit être faite lorsqu’est déposée une demande de permis de construire portant sur cet établissement ou lorsque le propriétaire de cet établissement ou son exploitant dépose toute demande de permis de construire, sauf si ce permis a pour objet de satisfaire à une obligation réglementaire.

Nota : dans le cas où l’établissement remplit une mission de service public, le représentant de l’Etat dans le département ne peut accorder une dérogation que si une mesure de substitution est prévue.

B/ La demande de dérogation
La demande de dérogation est transmise en trois exemplaires au représentant de l’Etat dans le département et indique :
✓ les règles auxquelles le demandeur souhaite déroger,
✓ les éléments du projet auxquels elles s’appliquent,
✓ les justifications produites dont la nature est précisée par un arrêté,
✓ ainsi que les mesures de substitution proposées dans le cas où l’établissement remplit une mission de service public.

C/ L’instruction du dossier
Dans le cadre du dossier de demande d’autorisation de construire, d’aménager, ou de modifier un ERP (document Cerfa) :
→L’identification de l’Ad’AP approuvé complète les pièces du dossier de l’autorisation (plans, notice,…) (Art. D.111-19-18 du CCH).
→Le délai d’instruction de la demande d’autorisation est de quatre mois à compter du dépôt du dossier (Art. R.111-19-22 du CCH).
→ A défaut de notification d’une décision expresse dans le délai de quatre mois (Art. R. 111-19-22 du CCH), l’autorisation de travaux est considérée comme accordée. Toutefois, le défaut de notification vaut décision implicite de rejet lorsque le préfet a refusé une dérogation.
→Si les pièces manquantes n’ont pas été transmises dans le délai fixé par l’autorité administrative ou, à défaut dans un délai d’un mois à compter de la date à laquelle la demande en a été faite au pétitionnaire, la demande d’autorisation est rejetée.
→La demande du dossier est présentée en quatre exemplaires.
→L’autorité chargée de l’instruction transmet un exemplaire de la demande assortie du dossier permettant de vérifier la conformité du projet avec les règles d’accessibilité aux personnes handicapées, à la commission compétente d’accessibilité en vue de recueillir son avis sur les dispositions du projet au regard des règles d’accessibilité des personnes handicapées.
Si la commission n’a pas transmis son avis dans un délai de deux mois à compter de sa saisine, elle est réputée avoir émis un avis favorable (Art. R .111-19-23 du CCH).
→Lorsque la demande d’autorisation de travaux comporte une demande de dérogation et que l’autorité compétente pour statuer sur la demande est le maire, celui-ci adresse sans délai, dès réception du dossier complet, un exemplaire de la demande et du dossier au préfet.
✓ La commission d’accessibilité départementale est la seule compétente pour émettre un avis sur la demande d’autorisation comportant une demande de dérogation. Cette compétence ne peut être déléguée.
✓ L’avis est adressé au préfet et à l’autorité chargée de l’instruction de la demande d’autorisation.
✓ Le préfet notifie sa décision motivée au demandeur de l’autorisation de travaux et en informe l’autorité chargée de l’instruction dans un délai de deux semaines suivant la décision.
✓ A défaut de réponse du préfet dans le délai de trois mois et deux semaines à compter de la date à laquelle la demande d’autorisation a été reçue ou complétée, la dérogation sollicitée est réputée :
-accordée lorsqu’elle concerne des établissements de IIIème, IVème et Vème catégorie.
-refusée lorsqu’elle concerne des établissements de première et deuxième catégorie.

Application
Les dispositions du présent décret s’appliquent aux demandes de permis de construire et aux demandes d’autorisations de construire, aménager ou modifier un établissement recevant du public déposées à compter de sa date d’entrée en vigueur, soit le 7 novembre 2014.

Source : circulaire juridique UMIH 34-14