Coronavirus : dispositions de la loi de finance rectificative

Fiches pratiques, L'actu du CHRD — 4 août 2021

Enrichie au cours du débat parlementaire, la loi de finances rectificative pour 2021 a été définitivement adoptée le 12 juillet et publiée au Journal Officiel le 20 juillet. Les mesures fiscales du texte sont la traduction des objectifs de soutien de l’économie en sortie de crise, en particulier des entreprises encore touchées par les contraintes sanitaires.

Dans notre article du 2 août, nous vous avons présenté l’assouplissement temporaire du mécanisme de report en arrière des déficits ou « carry-back », nous revenons dans cet article sur plusieurs autres dispositifs issus de la LFR 2021 :
– la prolongation jusqu’au 31 décembre 2021 du dispositif visant à encourager les abandons de loyers
– les précisions apportées sur le régime fiscal des aides accordées dans le cadre de la crise sanitaire
– le dégrèvement de taxe foncière pour les bailleurs de discothèque qui renoncent aux loyers de 2020

1) Prolongation jusqu’au 31 décembre 2021 du dispositif visant à encourager les abandons de loyers

L’article 8 de la loi de finances rectificative pour 2021 prolonge jusqu’au 31 décembre 2021 le dispositif visant à encourager les abandons de loyers consentis par des bailleurs en faveur des entreprises locataires avec lesquelles ils n’ont pas de lien de dépendance au sens de l’article 39, 12° du CGI.

Pour rappel, ce dispositif institué pour les abandons de loyers consentis entre le 15 avril et le 31 décembre 2020 a été prolongé une première fois pour les abandons de loyers effectués jusqu’au 30 juin 2021 (cf. notre article du 15 janvier 2021).

Ainsi, les abandons de loyers et accessoires afférents à un immeuble donné en location jusqu’au 31 décembre 2021 à une entreprise non liée ne sont pas imposables pour les bailleurs relevant des revenus fonciers (CGI art. 14 b), sont intégralement déductibles pour ceux imposés dans la catégorie des BIC (CGI art. 39, I-9°) et ne constituent pas une recette imposable pour les bailleurs relevant des BNC (par renvoi de l’article 92 B à l’article 39, I-9° du CGI).

Plusieurs conditions doivent toutefois être remplies afin de bénéficier de cette mesure (cf. notre article du 15 janvier en 2ème partie) :
– le locataire doit être une entreprise
– le bailleur et le locataire ne doivent pas être des entreprises liées au sens de l’article 39, 12° du Code général des impôts. On rappelle que des liens de dépendance sont réputés exister entre deux entreprises lorsque l’une détient directement ou par personne interposée la majorité du capital social de l’autre ou y exerce en fait le pouvoir de décision ou lorsqu’elles sont placées l’une et l’autre sous le contrôle d’une même tierce entreprise.
– lorsque l’entreprise du locataire est exploitée par un ascendant, un descendant ou un membre du foyer fiscal du bailleur personne physique, le bailleur doit pouvoir justifier par tous moyens les difficultés de trésorerie du locataire.

Enfin, nous vous rappelons que l’article 20 de la loi de finances 2021 du 29 décembre 2020 a instauré un crédit d’impôt au profit des bailleurs qui consentent au plus tard le 31 décembre 2021, des abandons de loyers aux entreprises locataires particulièrement touchées par les conséquences des mesures restrictives prises pour lutter contre l’épidémie de Covid-19.

Ce dispositif présenté dans notre article du 15 janvier 2021 concerne uniquement les loyers du mois de novembre 2020 et se traduit :
– pour les bailleurs d’entreprises de moins de 250 salariés, par un crédit d’impôt de 50 % des sommes abandonnées.
– pour les bailleurs d’entreprises de 250 à 5 000 salariés, par un crédit d’impôt de 50 % des sommes abandonnées, dans la limite des deux tiers du montant du loyer.

2) Le régime fiscal des aides accordées dans le cadre de la crise sanitaire est précisé

Les aides versées par le fonds de solidarité institué par l’ordonnance 2020-317 du 25 mars 2020 sont exonérées d’impôt sur les sociétés, d’impôt sur le revenu, ainsi que de toutes les contributions et cotisations sociales d’origine légale ou conventionnelle et ne sont pas retenues pour l’appréciation des limites relatives à certains régimes.

L’article 1er, II de la loi de finances rectificative pour 2021 clarifie le champ d’application de cette exonération en excluant de son bénéfice les aides versées indépendamment du fonds de solidarité, autres que les aides à la reprise visant à soutenir les entreprises ayant repris un fonds de commerce en 2020.

Sont concernées par la mesure les aides perçues à compter de l’année 2021 ou des exercices clos depuis le 1er janvier 2021.

S’agissant des aides à la reprise versées en application du décret n° 2021‑624 du 20 mai 2021, la date d’entrée en vigueur de la présente mesure d’exonération fiscale et sociale sera fixée par décret après réception par le Gouvernement de la décision de la Commission européenne permettant de le considérer comme conforme au droit de l’Union européenne en matière d’aides d’État.

Nature des aides versées

Exonération (non prise en compte des aides dans la détermination des seuils de chiffre d’affaires conditionnant l’application de certains régimes*)
– aides versées par le fonds de solidarité en application du décret 2020-371 du 30 mars 2020

Oui

– aides versées en application du décret 2020-1049 du 14 août 2020 adaptant pour les discothèques certaines dispositions du décret relatif au fonds de solidarité

Oui

– aides à la reprise versées en application du décret 2021- 624 du 20 mai 2021 visant à soutenir les entreprises ayant repris un fonds de commerce en 2020 et donc l’activité est particulièrement affectée par l’épidémie de Covid-19

Oui

– aides versées en application du décret 2021-310 du 24 mars 2021 destinées à compenser les coûts fixes non couverts par les contributions aux bénéfices

Non

– aides (autres que celles destinées à compenser les coûts fixes non couverts par les contributions aux bénéfices) au bénéfice des personnes physiques ou morales exploitant des remontées mécaniques au sens de l’article L 342-7 du Code du tourisme (versées en application du décret 2021-311 du 24 mars 2021)

Non

– aides destinées à tenir compte des difficultés d’écoulement des stocks de certains commerces à la suite des restrictions d’activité (versées en application du décret 2021-594 du 14 mai 2021).

Non

* Exonération d’IS ou d’IR et de toutes contributions et cotisations sociales d’origine légale ou conventionnelle et non prise en compte des aides pour l’appréciation des limites des régimes micro-BIC, micro-BNC, micro-BA et simplifié agricole, du régime réel simplifié BIC et du régime d’exonération des plus-values en fonction du montant des recettes.

3) Dégrèvement de taxe foncière pour les bailleurs de discothèque qui renoncent aux loyers de 2020

L’article 21 de la loi de finances rectificative pour 2021 prévoit que les propriétaires de discothèques peuvent, sous réserve d’une délibération des collectivités bénéficiaires, réclamer un dégrèvement de taxe foncière lorsqu’ils ont accordé au locataire exploitant une remise totale de loyers au titre de 2020.

En effet, le dégrèvement peut être accordé à raison des locaux utilisés par les établissements ayant fait l’objet d’une fermeture administrative continue entre le 15 mars 2020 et le 8 juillet 2021 en raison de la crise sanitaire due à l’épidémie de Covid-19. Dans les faits, cette possibilité ne concerne que les discothèques.

Seuls les propriétaires ayant renoncé aux loyers en 2020 ont droit au dégrèvement

L’article 21 de la loi réserve le bénéfice du dégrèvement aux propriétaires bailleurs.
Les propriétaires exploitants peuvent quant à eux bénéficier du dispositif de dégrèvement prévu à l’article 1389 du CGI en cas d’inexploitation d’un immeuble à usage commercial pendant plus de trois mois (cf. la réponse à la question  écrite n° 32840 à l’Assemblée Nationale d’Antoine Savignat).

Par ailleurs, l’article 21 de la loi réserve le bénéfice du dégrèvement à la condition que le propriétaire ait accordé au locataire exploitant « une remise totale de loyers au titre de 2020 ».

Ainsi rédigée, cette condition semble impliquer l’abandon de la totalité des loyers afférents à l’année 2020, y compris donc ceux afférents à la période du 1er janvier au 14 mars 2020 au cours de laquelle les établissements étaient ouverts.
Les commentaires de l’administration devraient prochainement préciser si cette mesure pourrait bénéficier aux propriétaires ayant renoncé aux seuls loyers de 2020 correspondant à la période de fermeture administrative. Il est toutefois permis de penser au vue de l’esprit du texte que cela serait possible.

Le dégrèvement est facultatif pour les communes et/ou EPCI

Le dégrèvement est soumis à l’adoption par les communes et/ou par les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre bénéficiaires de la taxe foncière sur les propriétés bâties d’une délibération en ce sens.

La délibération l’instituant doit être prise au plus tard le 1er octobre 2021. Elle reste facultative.

La délibération porte sur la part revenant à chaque commune ou EPCI à fiscalité propre, de sorte que le dégrèvement ne sera total que si la commune et l’EPCI délibèrent en ce sens. Il ressort, par ailleurs, des travaux parlementaires que chaque collectivité bénéficiaire peut renoncer totalement ou partiellement à la part qui lui revient.

Il est expressément précisé que le dégrèvement reste à la charge de la commune et/ou de l’EPCI qui l’accorde. Il n’est pas compensé par l’Etat.

Enfin, le bénéfice du dégrèvement est subordonné au respect de la règlementation européenne relative aux aides de minimis.

Le dégrèvement ne porte que sur la taxe foncière due au titre de 2021

Le dégrèvement porte sur la taxe foncière sur les propriétés bâties due au titre de l’année 2021, mais ne s’étend pas aux taxes annexes suivantes assises sur les mêmes bases (ni aux prélèvements opérés par l’Etat sur ces taxes en application de l’article 1641 du CGI) :
– taxe pour la gestion des milieux aquatiques et la prévention des inondations (Gemapi) (CGI art. 1530 bis)
– taxe additionnelle spéciale annuelle au profit de la région Île-de-France (CGI art. 1599 quater D)
– taxe d’enlèvement des ordures ménagères (CGI art. 1520)
– taxes spéciales d’équipement additionnelles à la taxe foncière sur les propriétés bâties (CGI art. 1607 bis, 1607 ter et 1609 B à 1609 G)
– contributions fiscalisées additionnelles à la taxe foncière sur les propriétés bâties levées conformément à l’article 1609 quater du CGI

Le dégrèvement n’est accordé que sur réclamation du propriétaire redevable de la taxe foncière

La demande prend la forme d’une déclaration à souscrire avant le 1er novembre 2021.

Elle doit être accompagnée des éléments permettant de justifier de la remise des loyers et de l’utilisation des locaux comme discothèque.

Source : circulaire fiscale UMIH 14-21