Circulaire sur la fermeture des discothèques à 7h

L'actu du CHRD — 21 juillet 2010

N° NOR IOC A 100 5027C

Objet :

Circulaire relative à l’horaire de fermeture des débits de boissons ayant pour activité principale l’exploitation d’une piste de danse.

Réf :

Art 15 du décret n° 2009-1652 du 23 décembre 2009

Résumé :

La présente circulaire précise les modalités d’application de l’article 15 du décret n° 2009-1652 du 23 décembre 2009 publié au Journal Officiel du 27 décembre 2009. Ce décret ne prive pas les préfets de la possibilité de prendre les mesures utiles relatives à l’ordre, à la sûreté, à la sécurité et à la salubrité publiques, lorsqu’elles excèdent le territoire d’une commune.

Le décret n° 2009-1652 du 23 décembre 2009 (JORF du 27/12/2009), pris pour l’application de l’article L 314-1 du code du tourisme, issu de l’article 29 de la loi n°2009-888 du 22 juillet 2009 de développement et de modernisation des services touristiques, dispose à son article 15 qu’il est créé au titre Ier du livre III du code du tourisme un chapitre IV intitulé « Débits de boissons ayant pour activité principale l’exploitation d’une piste de danse », comprenant un article D.314-1 aux termes duquel :

« L’heure limite de fermeture des débits de boissons ayant pour objet principal l’exploitation d’une piste de danse est fixée à 7 heures du matin.

La vente de boissons alcooliques n’est plus autorisée dans les débits mentionnés au premier alinéa pendant l’heure et demie précédant sa fermeture. »

Il en résulte que le droit commun est la fermeture de ces établissements à 7 h. Ceux d’entre eux qui bénéficieraient d’une dérogation pour une ouverture au-delà de cet horaire devront se conformer à cette nouvelle règle.

1-L’entrée en vigueur de cette disposition :

Cette disposition, qui ne figure pas aux articles 17 et 18 dudit décret qui prévoient l’application décalée dans le temps d’une série de mesures, est d’application immédiate, soit un jour franc après la publication du décret le 27 décembre 2009. Elle est entrée en vigueur le 28 décembre 2009.

2-La mise en œuvre des dispositions de l’article 15 :

2-1- Les établissements concernés

Le texte concerne les établissements dont l’activité principale l’exploitation d’une piste de danse. L’intention du législateur vise en conséquence directement les discothèques, ainsi qu’il ressort des débats parlementaires (A.N. séance du 17 juin 2009 ; rapport devant le Sénat du 1er juillet 2009). L’exposé de présentation de l’amendement introduisant cette disposition cite les «autres établissements de nuit » qui exploitent au titre de leur activité principale une piste de danse, mais ne donne aucun critère de définition de ces établissements. Dans ce dernier cas, l’exploitant d’un débit de boissons qui souhaitera bénéficier du régime d’ouverture tardive prévu par le décret du 23 décembre 2009 devra justifier auprès de vos services, par des critères objectifs (conformation des lieux, programme d’activité…), que sa principale activité est l’exploitation d’une piste de danse.

Ces dispositions nouvelles sont applicables à l’ensemble des établissements, qu’elle que soit leur localisation, qu’ils aient bénéficié ou non, avant la parution de ce décret, d’une dérogation aux horaires de fermeture délivrée par le préfet.

Par ailleurs, les règles édictées au plan local pour les débits de boissons dont l’activité principale n’est pas l’exploitation d’une piste de danse restent inchangées.

2-2- Le régime applicable

Une heure limite de fermeture des débits de boissons ainsi que les dérogations variées dont bénéficient les discothèques, notamment en fin de semaine, ont été fixées par arrêté préfectoral.

Désormais, pour les discothèques, le décret prévoit une heure limite de fermeture à 7 h, et une heure limite de vente d’alcool une heure et demie plutôt, soit 5h30. Vous modifierez les dispositions de votre arrêté qui seraient contraires à cette règle.

Dans ces limites, il appartient à l’exploitant de fixer librement les heures d’ouverture de son établissement et de veiller au respect, en conséquence, de l’heure limite de vente d’alcool, dont il est de sa responsabilité d’informer sa clientèle.

Il lui revient également d’informer les services de police et de gendarmerie de ses horaires de fermeture, afin de les mettre à même de remplir leur mission de contrôle, notamment sur l’heure à partir de laquelle la vente d’alcool n’est plus autorisée.

Ainsi que le font apparaitre les discussions parlementaires, le législateur a entendu adopter un dispositif qui « homogénéise le régime de fermeture des discothèques sur tout le territoire national sans interdire aux autorités de prendre localement des mesures adaptées aux situations particulières des territoires » (cf. rapport sénatorial de Ier juillet 2009 de la commission de l’économie, du développement durable et de l’aménagement du territoire).

2-3- Les pouvoirs du préfet

La disposition nouvelle, instituée par l’article 15 du décret du 23 décembre 2009, ne remet pas en cause le pouvoir que détiennent les maires, en application de l’article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales, de prendre au titre de leur pouvoir de police, dans leur commune, une disposition plus restrictive, compte tenu des circonstances locales.

De même les préfets sont fondés, par l’effet de la loi (cf. notamment l’article L 2215-1/3° du code général des collectivités territoriales, lequel dispose : « Le représentant de l’Etat dans le département est seul compétent pour prendre les mesures relatives à l’ordre, à la sûreté, à la sécurité et à la salubrité publiques, dont le champ d’application excède le territoire d’une commune »), à prendre, sur un territoire limité, voire pour tout le département, lorsque les circonstances locales l’exigent effectivement, par arrêté, des mesures plus restrictives (cf. en ce sens l’arrêt du Conseil d’Etat du 18 décembre 1959, « Société les films LUTETIA »). L’exposé de présentation de l’amendement précisait d’ailleurs expressément qu’ « il convient de fixer des règles plus homogènes par décret, sans exclure a priori la compétence du préfet pour tenir compte des particularités locales ».

Le préfet peut également, par son pouvoir de substitution (art L. 2215-1/1 – 1er al.), prendre une mesure qui ne dépasserait pas le territoire d’une seule commune, après une mise en demeure au maire restée sans résultat.

Toutefois, ces mesures doivent désormais être spécialement adaptées et motivées au regard des menaces à l’ordre et à la sécurité publics que la poursuite de l’activité jusqu’à 7 h ferait courir.

Si vous estimez qu’une restriction à l’heure limite de fermeture de plusieurs établissements concernés, doit être prise au regard des circonstances locales, celle-ci devra faire l’objet d’une décision particulièrement motivée par des éléments de fait. Une mesure restrictive pour l’ensemble du département ne pourrait présenter qu’un caractère ponctuel et limité dans le temps.

Au regard de la jurisprudence (voir en ce sens l’arrêt du Conseil d’Etat du 3 mars 1993, « S.A. Carmag », n° 116550 mais aussi celui de la CAA de Douai, 16 octobre 2008, n° 08DA0260, et de la CAA de Marseille, 16 juin 2008, n° 07MA00592), vous veillerez dans vos décisions à respecter les principes dégagés par la jurisprudence administrative. Celles-ci devront :

· ne pas présenter le caractère d’une mesure d’interdiction générale et absolue,

· être proportionnelles à l’objectif à atteindre,

· respecter le principe de la liberté du commerce et de l’industrie,

· ne pas créer de discrimination illégale entre des établissements de même type situés dans des départements voisins.

Vous n’hésiterez pas à vous fonder, dans les motivations de vos décisions, sur les rapports de police ou de gendarmerie circonstanciés portés à votre connaissance, établissant des faits avérés et des statistiques en matière d’accidentologie mettant par exemple en évidence la part importante des accidents graves de la circulation liés à la consommation excessive d’alcool et sur le fréquence de ce type d’accidents touchant des personnes jeunes, essentiellement la nuit et en fin de semaine (cf. CAA de Bordeaux, 19 février 2008, n° 06BX00838).

De même les circonstances particulières propres au département ou à une zone déterminée devront être mises en exergue dans votre décision (cf. CAA de Lyon, 13 juillet 2005, n° 00LY01580).

Vous n’omettrez pas de viser, citer et reprendre des extraits de ces éléments factuels à l’appui de votre décision (cf. Conseil d’Etat 3 mars 1993, « S.A. Carmag », précité).

Par ailleurs, s’agissant des établissements situés en limite de département, vous veillerez à vous coordonner avec le préfet du département limitrophe.

Si vous estimez cependant, au regard des éléments de contexte en votre possession, que ces établissements peuvent rester ouverts jusqu’à 7 h, il ne sera pas nécessaire de prendre pour ces mêmes établissements, une disposition quelconque. Vous pourrez rappeler à l’exploitant ses obligations en conséquence.

Pour autant, vous pourrez à tout moment, au regard d’informations portées à votre connaissance, faire jouer votre pouvoir de police et prendre, en la motivant, une décision restreignant l’horaire de fermeture.

2-4- Les dispositions relatives à l’interdiction de la vente de boissons alcooliques durant l’heure et demie avant la fermeture

Le deuxième alinéa de l’article D 314-1 s’applique de droit, sans qu’il soit nécessaire de le rappeler dans un arrêté préfectoral.

Cependant, si vous amenez à prendre une décision de limitation de l’ouverture tardive, vous pourrez préciser dans votre décision, l’heure limite de vente des boissons alcooliques ainsi décalée qui sera fixée une heure et demie avant l’heure de fermeture.

Sauf circonstances exceptionnelles justifiant une restriction qui devrait être particulièrement motivée, la plage horaire d’interdiction de vente de boissons alcooliques sera fixée à l’heure et demie prévue dans le décret.

3- Les sanctions :

Un débit de boissons dont le responsable ne se conforme pas aux lois et règlements en vigueur peut faire l’objet, en application du code de la santé publique (et notamment de l’article L 3332-15), d’une mesure de fermeture administrative après, le cas échéant, un avertissement.

En application de l’article L 3352-6 de ce même code, le fait de ne pas se conformer à une mesure de fermeture d’établissement ordonnée ou prononcée en application des articles L. 3332-15 ou L. 3332-16 est puni de deux mois d’emprisonnement et de 3750 euros d’amende.

Vous serez particulièrement attentif à ce que cette mesure de simplification de l’heure limite de fermeture d’une certaine catégorie d’établissements qui vendent des boissons alcooliques ne conduise pas, au niveau local, à une aggravation des problèmes d’ordre public et de l’accidentologie routière.

Vous rendrez compte à mes services (DMAT-SDAT-BPA) des contentieux qui seront engagés en la matière.

Le préfet, secrétaire général,

Henri-Michel COMET