Ethylotests : 4 – Les décisions de l’été 2011

L'actu du CHRD — 3 novembre 2011

La mise en place des éthylotests dans les débits de boissons vise à réduire les chiffres d’accidentologie sur la route au motif de l’alcoolémie des conducteurs. Idéalement, celui a trop bu ne conduit pas et tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes. A l’inverse, au pire des cas, le drame se noue avec la mort du conducteur alcoolisé, lequel peut aussi prendre la vie d’autres personnes innocentes. Dans ces cas-là, l’autorité administrative ne fait pas dans le détail et prend des mesures contre l’établissement d’où sortait le conducteur. Pourtant, cet été, deux décisions ont été prises dans un sens tout à fait contraire…

Une décision de justice inhabituelle…
Le dimanche 24 juillet 2011, au petit matin, une jeune fille de 24 ans qui sort de discothèque prend le volant et s’engage sur l’autoroute A7 en contresens. Elle roule près de 30 minutes avant d’entrer en collision avec un autre véhicule dans lequel circule une famille de 5 personnes. Trois décèdent et deux sont grièvement blessées. La conductrice elle, trouve elle aussi la mort. L’autopsie révèle qu’elle avait 2,3 g d’alcool par litre de sang. Trois jours plus tard, Hugues Parant, Préfet des Bouches-du-Rhône, lieu du drame, arrête une fermeture administrative de deux mois contre l’établissement d’Aix-en-Provence d’où sortait la conductrice. Sur l’antenne de RMC où on débat de cette affaire, 71 % des auditeurs se prononcent contre la sanction prise à l’encontre de l’établissement. Et surprise, après une procédure en référé liberté, le 5 août, le Tribunal Administratif de Marseille annule cet arrêté, le jugeant « précipité » sous le coup de l’émotion et déplorant l’absence d’avertissement préalable, de procédure contradictoire, quand aucun manquement n’a été constaté chez l’exploitant. La décision du Tribunal Administratif mentionne notamment : « Dans cette affaire, l’arrêté de fermeture n’invoque pas l’existence d’une telle situation d’urgence », elle fait état des « risques pour la pérennité de l’activité de l’établissement » et dénonce la décision du Préfet : « En prenant une mesure de fermeture litigieuse, sans l’avoir au préalable invité à présenter sa défense, le Préfet a porté à la liberté fondamentale du commerce et de l’industrie, une atteinte grave et manifestement illégale ». La fermeture aurait supposé une perte de 300 000 € au risque d’un dépôt de bilan menaçant les 28 salariés de l’établissement.

… suivie d’une autre
Dans une autre affaire, suite à l’interpellation de deux mineurs en état d’ivresse, la décision condamnant un autre établissement à un mois de fermeture est également annulée par le Tribunal Administratif de Marseille qui a estimé qu’on ne pouvait faire le lien entre l’alcoolémie des deux garçons et  les conditions d’exploitation de la boîte de nuit qui emploie 35 salariés.

Et à partir du 1er décembre 2011 ?
Ces deux décisions changent du tout au tout au regard des années passées, notamment quand en 2004, un établissement avait été fermé pendant six mois suite à un accident qui avait coûté la vie à trois jeunes qui en sortaient. Une question se pose  maintenant : avec la mise à disposition gratuite d’éthylotests dans les débits de boissons, d’usage facultatif pour la clientèle, sans que l’exploitant puisse se permettre de confisquer le véhicule d’une personne avérée positive, qu’en sera-t-il de la responsabilité retenue de l’exploitant ? Sera-t-il dédouané de toute responsabilité pour avoir mis à disposition le matériel préventif nécessaire, ou au contraire, sa responsabilité sera-t-elle encore plus mise en avant arguant qu’un résultat positif avait été constaté dans l’enceinte même de son établissement ?