Jeffrey : 20 ans, pas une ride !

Le SNEG vous recommande, Scènes — 24 septembre 2012

Jeffrey2012TheatreClavelAprès ses premières mises en scène théâtrales aux Etats-Unis et en Europe dès 1992, son adaptation au cinéma en 1995 avec notamment Michael T. Weiss (« Le Caméléon »), une reprise en France en 2007, « Jeffrey » fête ses vingt ans avec une nouvelle création. L’auteur, Paul Rudnick, est aussi le scénariste de la première version de « Sister Act » ou encore de « In & Out ». Jeffrey, rôle titre de cette pièce, est un jeune new-yorkais, gay, comédien et surtout serveur. Accumulant les coups d’un soir sans lendemain tandis que le sida fait des ravages, il décide, désillusionné et apeuré, d’arrêter le sexe. C’est sans compter sur l’irruption dans sa vie d’un garçon qui a tout pour lui, hormis qu’il est séropositif… A leur création en France, les premières représentations de « Jeffrey », d’après l’adaptation de Christian Bordeleau, sonnaient terriblement justes. Avant l’arrivée des trithérapies, le sida était encore une menace et nombreux encore étaient les gays qui décédaient de maladies opportunistes. Aujourd’hui, fort heureusement, le bilan n’est plus le même. Au prix de traitements à vie aux effets secondaires insoupçonnés, les séropositifs survivent au sida. En revanche, vingt ans après, ce qui n’a pas changé, c’est le regard porté sur les séropositifs par les séronégatifs : dans les pires des cas, peur, hypocrisie, mensonge sont souvent les seules réponses que reçoivent des séropositifs qui ont eux, dans la peur aussi, mais dans la transparence et dans l’honnêteté, dévoilé le plus terrible de leur intimité. Si le texte d’origine reste, malheureusement, d’actualité sur ce point, le reste aurait pu paraître démodé, voire carrément désuet, si Stéphane Henriot n’avait pas su l’actualiser, ainsi que sa mise en scène. Or, pour le plus grand bonheur du spectateur, il n’en est rien. Qui voit « Jeffrey » pour la première fois dans cette nouvelle version, ne pourrait soupçonner la relative ancienneté de son texte. Lady GaGa, Grindr pour ne citer que ces deux exemples, sont autant de signes de modernité. Ne manquez pas d’aller voir « Jeffrey », un texte qui renaît et revit, pour parler du sida, comme il convient d’en parler aujourd’hui en 2012, pour témoigner de la crainte qu’il suscite encore, mais aussi pour nous faire rire, de cet humour gay qui ironise, dédramatise, même si derrière certains rires, se cache une douleur, une blessure.
« Jeffrey » au Théâtre Clavel, 3 rue Clavel 75019 Paris, du jeudi au samedi à 21 h 30 jusqu’au 27 octobre 2012. Réservations : 06 14 4 3 80 56.