La protection du salarié malade

Fiches pratiques — 17 novembre 2006

1) Le principe : un salarié ne peut faire l’objet d’un licenciement à raison de son état de santé
Tout salarié bénéficie d’une protection contre les discriminations fondées sur son état de santé.
Néanmoins, la maladie peut être une cause de suspension du contrat de travail. Dans ce cas, elle peut ouvrir un droit au maintien du salarié dans les effectifs de l’entreprise par application de la clause conventionnelle appelée « garantie emploi » lorsque la convention collective applicable le prévoit.

2) Cas où la maladie est une cause de suspension de contrat de travail
A) Les maladies liées à l’emploi et les maladies professionnelles ou états pathologiques découlant d’un accident de travail
L’arrêt de travail lié à ces maladies, ne peut en aucun cas justifier un licenciement de l’entreprise où la maladie professionnelle a été contractée (article L 122-32-1 du code du travail).
Toutefois l’article L 122-32-2 du code du travail permet à l’employeur de rompre le contrat de travail du salarié malade dans deux hypothèses :
– la faute grave commise par le salarié justifie la rupture du contrat de travail du salarié malade (CDI ou CDD) ;
– la force majeure autorise la rupture du seul CDD.
Le licenciement d’un salarié malade prononcé en dehors de ces cas est nul.

B) Les autres maladies
Concernant les autres maladies, il convient de distinguer selon que le salarié est lié à l’entreprise par un contrat à durée déterminée ou non.
– Cas ou le salarié est en CDD :
La maladie ne figure pas au nombre des cas qui pouvant autoriser une rupture anticipée d’un CDD.
L ‘employeur a l’obligation de maintenir le salarié dans les effectifs de l’entreprise jusqu’à l’arrivée à terme du contrat de travail.
– Cas ou le salarié est en CDI
La maladie du salarié n’est pas en elle-même une cause de licenciement. Toutefois l’article L 122-45 du code du travail interdit de licencier un salarié en raison de son état de santé, sauf inaptitude qui doit être constatée par le médecin.

3) La protection du salarié : « la garantie d’emploi conventionnelle »
Les conventions collectives comportent souvent des clauses relatives à la suspension du contrat de travail en cas de maladie du salarié, qui ont pour effet d’assurer le maintien du salarié malade dans l ‘entreprise pendant une certaine durée.
Au-delà de cette durée, l’employeur retrouve la possibilité de licencier le salarié.

A) Application de cette clause
Elle s’applique non seulement en cas de maladie prolongée mais également en cas d’absences répétées pour maladie.

B) Sanction de la violation de la période de protection
La notification du licenciement par l’employeur avant l’expiration de la durée de la protection fixée par la convention collective est interdite.
Le licenciement prononcé en violation de la clause garantie d’emploi conventionnelle est abusif et peut donner lieu à une réintégration du salarié dans les effectifs de l’entreprise.
La seule expiration de la période de protection prévue en cas de maladie par la convention collective ne constitue pas une cause réelle et sérieuse de licenciement.
Le motif réel et sérieux du licenciement doit être attaché à l’intérêt de l’entreprise et le remplacement définitif du salarié malade doit être nécessaire, faute de quoi le licenciement prononcé au mépris de ces prescriptions est nul.

4) Les exceptions : le licenciement du salarié malade
La loi a strictement encadré les atteintes au principe de protection du salarié malade et les juges l’appliquent avec rigueur.
Il existe deux hypothèses qui autorisent le licenciement d’un salarié malade :
– L’inaptitude du salarié malade
– La situation objective de l’entreprise

A) L’inaptitude du salarié constatée par le médecin du travail (article L 122-45 du code du travail)
L’inaptitude du salarié à son poste de travail, ne peut être constatée que par le médecin du travail (à moins que le maintien du salarié à son poste de travail n’entraîne un danger immédiat pour sa santé ou sa sécurité, ou pour celle de tiers article R 241-51-1 du code du travail) :
– Soit dans le cadre de la surveillance médicale régulière des salariés,
– Soit dans le cadre de la visite médicale de reprise.
Le constat de l’inaptitude du salarié à son poste de travail se fait :
– Après une étude de son poste et des conditions de travail dans l’entreprise
– Et à la suite de 2 examens médicaux de l’intéressé, espacés de deux semaines.
Le médecin du travail doit se prononcer sur les possibilités de reclassement dans l’entreprise.
L’employeur est tenu de reclasser le salarié à l’intérieur du groupe auquel appartient l’entreprise.
Le poste proposé à l’issue du reclassement ne doit pas entraîner de modification substantielle du contrat de travail.
Si le salarié refuse le reclassement proposé, l’employeur doit faire de nouvelles propositions au salarié ou procéder à son licenciement en raison de l’impossibilité de reclassement.
Le licenciement du salarié malade peut aussi être envisagé par l’employeur si, le fonctionnement de l’entreprise est perturbé par l’absence du salarié et que le remplacement définitif du salarié s’avère indispensable à la bonne marche de l’entreprise.

B) L’atteinte au bon fonctionnement de l’entreprise et le remplacement définitif du salarié malade
Un employeur peut licencier un salarié malade lorsque la maladie perturbe réellement la bonne marche de l’entreprise.
La Cour de cassation contrôle la réalité des perturbations causées au fonctionnement de l’entreprise.
Elle juge de manière constante que :
« Le licenciement peut être motivé, non pas par l’état de santé du salarié mais par la situation objective de l’entreprise qui se trouve dans la nécessité de pourvoir au remplacement définitif d’un salarié dont l’absence prolongée ou les absences répétées perturbe son fonctionnement », (Soc 13 mars 2001 ; RJS 5/01, n°592 et Soc 9 juillet 2003 ; RJS 10/03 ;n°1148).
Plusieurs éléments d’appréciations sont retenus par les juges afin de caractériser la désorganisation de l’entreprise :
– Nombre et durée des absences
– Taille de l’entreprise
– Nature des fonctions exercées
Les absences d’un salarié travaillant dans une petite entreprise ou dans une équipe restreinte sont plus perturbatrices que dans une structure plus importante.
En revanche les absences d’un salarié sans qualification sont moins gênantes que celles d’un salarié plus spécialisé.
La réalité et le sérieux du motif du licenciement s’apprécient au moment où la rupture du contrat a été envisagée par l’employeur.
Si le salarié malade est licencié au moment où il reprend effectivement son poste, le licenciement est nul.

5) Sanctions du licenciement prononcé au mépris des dispositions légales
A) Le licenciement d’un salarié malade en contrat à durée déterminée
Le licenciement abusif lui ouvre droit, non pas au paiement de sa rémunération pour la période non travaillée, mais au paiement de dommages et intérêts.

B) Le licenciement d’un salarié malade en contrat à durée indéterminée
Le licenciement ouvre droit au salarié à la réintégration de son poste de travail le cas échéant; s’il refuse la réintégration, il peut obtenir, outre le paiement de 6 mois de salaire, le paiement de dommages et intérêts au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse.

C) Le licenciement discriminatoire en raison de l’état de santé du salarié
Les atteintes au principe de non-discriminations sont passibles de sanctions pénales. (articles 225-1 à 225-4 du code pénal : amende de 30.000€ et de deux ans emprisonnement). Les entreprises, personnes morales, peuvent être déclarées pénalement responsables de ces infractions.

A jour au 21 juillet 2005