L’aigle de la neuvième légion : Channing et Jamie

Films, Le SNEG vous recommande — 4 mai 2011

L'aigle de la neuvième légionVoilà un film qui se regarde avec plaisir. Il s’agit de l’adaptation du roman éponyme de Rosemary Sutcliff, inspiré de la disparition réelle en 120 après JC de la légion de 5 000 hommes dont il est question dans le film, qui contrairement à la réalité révèle ce qu’elle est devenue… ou plutôt ce qu’elle pourrait être devenue d’après l’imagination de la romancière. A noter que malgré ses grands airs de film hollywoodien, il s’agit d’une production britannique qui n’a pas à rougir des moyens mis en oeuvre.
Dans cette aventure historique, à l’instar des « 300 » de Zack Snyder, pas de hordes innombrables de guerriers rajoutés en images de synthèse, mais surtout des patrouilles romaines et des tribus en petits nombres se font face dans des duels au glaive et au bouclier. Ce choix d’éviter la surenchère de moyens est appréciable et apporte plus de réalisme et de crédibilité au scénario. Au-delà de la portée historique, le scénario se focalise beaucoup sur la relation maître-esclave des deux protagonistes principaux : il s’agira surtout de questions d’honneur, de loyauté et de courage. Les scènes de combats sont filmées de la même façon que la plupart des scènes de combats du genre : images brèves et entrecoupées, généralement filmées de très près, qui ne laissent que peu voir ce qui se passe réellement. Une seule scène fait figure d’exception : au milieu d’un combat d’une trentaine d’hommes, les deux chefs luttent l’un contre l’autre et tous les bruits alentours ont été écartés ; seuls résonnent leurs glaives se heurtant l’un à l’autre, le bruit de leurs pas dans l’eau, comme si tous les autres valeureux combattants autour d’eux n’existaient plus l’espace d’un instant. Ce combat est le combat et cette manoeuvre cinématographique donne une profondeur intense à la scène.
Outre l’action, les décors des Highlands d’Ecosse sont magnifiques d’austérité, de majestuosité et d’une froideur glaçante. Un soin particulier est apporté aux costumes et aux maquillages des tribus, notamment celles des Phoques (étrange nom pour une étrange tribu) et le souci du détail va jusqu’à les faire parler en gaélique ancien. La réalité rejoint aussi la culture moderne, les fans d’Astérix reconnaîtront les formations romaines de défense « en tortue », sorte de clin d’oeil historique aux clichés connus d’aujourd’hui.
Pour incarner le duo viril et épique de ce film historique, on retrouve tout d’abord Channing Tatum dans le rôle du centurion. Son nom et sa plastique sont plus connus que sa filmographie mais on a pu récemment le voir dans l’un des rôles principaux de « G.I. Joe, le réveil du cobra ». Son interprétation assez égale ne casse pas des briques et son envie de laver l’honneur de son père disparu à la tête de la neuvième légion le font plus souvent passer pour un dépressif que pour un héros en quête d’honneur. A ses cotés, dans la peau d’Esca, son esclave, Jamie Bell est bien plus convaincant dans son personnage qui joue double-jeu laissant toujours le spectateur dans le doute sur ses intentions, torturé par un honneur qu’il veut lui aussi laver et la loyauté envers l’homme à qui il doit la vie. Découvert et révélé grâce au rôle de « Billy Elliot » dans le film du même nom, on pourra prochainement le retrouver dans l’adaptation des aventures de Tintin de Steven Spielberg, après avoir joué dans plusieurs grosses productions américaines (« Jumper », « King Kong »). Les seconds rôles sont eux aussi loin d’être négligeables, avec entre autres la présence de Donald Sutherland qu’on ne présente plus et le jeune français Tahar Rahim, découvert dans « Le prophète » de Jacques Audiard et de plus en plus courtisé par Hollywood.
Epique et historique, sans être ennuyeux et toujours dans un souci de réalisme, « L’aigle de la neuvième légion » convainc les plus sceptiques sans pour autant les faire succomber à tous les autres films du genre, grâce notamment à l’interprétation ambivalente de Jamie Bell.
Pour le SNEG, Duarte http://duartelittle.skyrock.com
« L’aigle de la neuvième légion » de Kevin Mc Donalds. Sortie le 4 mai 2011.