Les Amazones de la République : coulisses politico-média

Le SNEG vous recommande, Livres — 11 mars 2014

Les amazones de la RépubliqueUne bâtisse : l’Elysée. Un homme : le Président de la République. Sous les ors du palais, symbole du pouvoir politique suprême, les locataires successifs ont suscité bien des convoitises et attiré nombre de courtisanes, au premier rang desquelles les journalistes. Françoise Giroud, pour être une féministe avérée, avait pourtant instauré le principe de dépêcher de jeunes et jolies collaboratrices de l’hebdomadaire « L’Express » pour assurer au magazine l’exclusivité de quelques confidences en provenance de la rue Saint-Honoré. Au fil des pages, sont ainsi égrainés les noms de chroniqueuses politiques, d’hier et d’aujourd’hui, bien connues du grand public : Jacqueline Chabridon, Catherine Nay, Michèle Cotta, Sylvie-Pierre Brossolette, Ghislaine Ottenheimer, Marine Jacquemin, Valérie Triewiller, Laurence Ferrari… A la fin des années 50, De Gaulle n’avait guère d’appointance avec la gente féminine issue des rédactions, pas de quoi inquiéter tante Yvonne ! Dès Pompidou, formant avec Claude un couple plus libéral, les propos se font plus croustillants. Mais il aura fallu mai 68 et la libération des moeurs pour que le phénomène s’amplifie avec Giscard d’Estaing, plus enclin à séduire les artistes que les journalistes, loin des soirées au coin du feu avec Anne-Aymone. En revanche, Mitterrand était un séducteur aussi redoutable qu’intarissable. Le livre évoque aussi la relation avec Anne Pingeot, la mère de Mazarine, la fille cachée, dont aucun journaliste n’ignorait l’existence sans pour autant la révéler avant que le président lui-même, en « accord » avec Danièle, ne décide de lever le voile. Jugé bel homme par les suffragettes, Chirac, malgré la vigie Bernadette, a preque failli divorcer pour les beaux yeux d’une rédactrice du « Figaro ». Sarkozy nourrit aussi les pages finales de l’ouvrage, puisqu’entre Cécilia et Carla, une célèbre présentatrice du 20 heures hanta un temps les couloirs de l’Elysée. Enfin, avant même qu’Hollande, seul président célibataire soit élu en France, figurait déjà une certaine journaliste de « Paris Match » qui serait plus tard écartée du pouvoir à la faveur d’une relation avec une actrice…

Lire « Les amazones de la République » à l’heure de l’affaire « Closer » aux premiers jours de l’année 2014, c’était être au coeur su sujet ! Qui aime la politique, les médias et les artistes ne pourra qu’apprécier l’ouvrage de Renaud Revel, lui-même journaliste à « L’Express ». Si l’auteur prend quelques gants pour évoquer certains faits, relater quelques anecdotes, le récit s’appuie sur les récits de témoins précieux : ces femmes journalistes elles-mêmes, des directeurs de cabinet, des chauffeurs de voitures officielles… On peut comprendre la précaution : nombre de ces présidents sont encore vivants, de même que leurs conquêtes, qu’elles aient été confidentes, maîtresses d’un soir ou amantes d’un temps. En revanche, on peut regretter le style de Renaud Revel, quelques constructions de phrases un peu complexes qui prive du plaisir d’une lecture simple et fluide. Au final, on se délecte quand même, en voyeur curieux et amusé, de ces coulisses politico-médiatiques qui pour paraître frivoles, ont pour certaines d’entre elle influé au coeur du pouvoir.

Rémi Calmon

« Les Amazones de la Républiques » de Renaud Revel. Editions First. 19,95 €. Parution le 6 juin 2013.