Licenciement individuel pour motif économique

Fiches pratiques — 3 octobre 2008

“Constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d’une suppression ou transformation d’emploi ou d’une modification, refusée par le salarié, d’un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment à des difficultés économiques ou à des mutations technologiques.”

L’employeur doit respecter strictement la procédure prévue par le Code du Travail sous peine de diverses sanctions.

Phase 1

Le licenciement ne peut intervenir que s’il est impossible de reclasser ou d’adapter le poste et pour une catégorie d’emploi il faut respecter des règles pour choisir le salarié qui va être licencié.

1- LES OBLIGATIONS D’ADAPTATION ET DE RECLASSEMENT

L’ Article L1233-4 du Code du Travail prévoit que “Le licenciement pour motif économique d’un salarié ne peut intervenir que :
– lorsque tous les efforts de formation et d’adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l’intéressé ne peut être opéré dans l’entreprise ou dans les entreprises du groupe auquel l’entreprise appartient.
– Le reclassement du salarié s’effectue sur un emploi relevant de la même catégorie que celui qu’il occupe ou sur un emploi équivalent.
– A défaut, et sous réserve de l’accord exprès du salarié, le reclassement s’effectue sur un emploi d’une catégorie inférieure.
– Les offres de reclassement proposées au salarié sont écrites et précises.

2- LES CRITÈRES D’ORDRE DES LICENCIEMENT

Lorsque l’employeur procède à un licenciement individuel pour motif économique, il prend en compte, dans le choix du salarié concerné, les critères qui prennent notamment en compte :
1° Les charges de famille, en particulier celles des parents isolés ;
2° L’ancienneté de service dans l’établissement ou l’entreprise ;
3° La situation des salariés qui présentent des caractéristiques sociales rendant leur réinsertion professionnelle particulièrement difficile, notamment celle des personnes handicapées et des salariés âgés ;
4° Les qualités professionnelles appréciées par catégorie.

PHASE 2

Dans le cas ou l’adaptation ou le reclassement n’est pas possible il faut respecter la procédure de licenciement de manière stricte.

L’employeur a l’obligation de proposer une convention de reclassement personnalisé au salarié qu’il envisage de licencier pour motif économique. (voir partie II ci dessous).

I- LA PROCÉDURE À L’ÉGARD DU SALARIÉ

Le Code du Travail expose précisément la procédure à suivre :
A- Entretien préalable.
Article L1233-11
L’employeur qui envisage de procéder à un licenciement pour motif économique, qu’il s’agisse d’un licenciement individuel ou inclus dans un licenciement collectif de moins de dix salariés dans une même période de trente jours, convoque, avant toute décision, le ou les intéressés à un entretien préalable.
La convocation est effectuée par lettre recommandée ou par lettre remise en main propre contre décharge. Cette lettre indique l’objet de la convocation.
L’entretien préalable ne peut avoir lieu moins de cinq jours ouvrables après la présentation de la lettre recommandée ou la remise en main propre de la lettre de convocation.
Article L1233-12
Au cours de l’entretien préalable, l’employeur indique les motifs de la décision envisagée et recueille les explications du salarié.
Article L1233-13
Lors de son audition, le salarié peut se faire assister par une personne de son choix appartenant au personnel de l’entreprise.
Lorsqu’il n’y a pas d’institutions représentatives du personnel dans l’entreprise, le salarié peut se faire assister soit par une personne de son choix appartenant au personnel de l’entreprise, soit par un conseiller du salarié choisi sur une liste dressée par l’autorité administrative.
La lettre de convocation à l’entretien préalable adressée au salarié mentionne la possibilité de recourir à un conseiller et précise l’adresse des services où la liste des conseillers est tenue à la disposition des salariés.

B- Notification du licenciement.
Article L1233-15
Lorsque l’employeur décide de licencier un salarié pour motif économique, qu’il s’agisse d’un licenciement individuel ou inclus dans un licenciement collectif de moins de dix salariés dans une même période de trente jours, il lui notifie le licenciement par lettre recommandée avec avis de réception.
Cette lettre ne peut être expédiée moins de sept jours ouvrables à compter de la date prévue de l’entretien préalable de licenciement auquel le salarié a été convoqué.
Ce délai est de quinze jours ouvrables pour le licenciement individuel d’un membre du personnel d’encadrement mentionné au 2° de l’article L. 1441-3.
Article L1233-16
La lettre de licenciement comporte l’énoncé des motifs économiques invoqués par l’employeur.
Elle mentionne également la priorité de réembauche prévue par l’article L. 1233-45 et ses conditions de mise en œuvre.
Article L1233-17
Sur demande écrite du salarié, l’employeur indique par écrit les critères retenus pour fixer l’ordre des licenciements.
C- Priorité de réembauche.
Article L1233-45
Le salarié licencié pour motif économique bénéficie d’une priorité de réembauche durant un délai d’un an à compter de la date de rupture de son contrat s’il en fait la demande au cours de ce même délai.
Dans ce cas, l’employeur informe le salarié de tout emploi devenu disponible et compatible avec sa qualification. En outre, l’employeur informe les représentants du personnel des postes disponibles et affiche la liste de ces postes.
Le salarié ayant acquis une nouvelle qualification bénéficie également de la priorité de réembauche au titre de celle-ci, s’il en informe l’employeur.

II : Convention de reclassement personnalisé. (CRP)

L’employeur a l’obligation de proposer à chaque salarié dont il envisage de prononcer le licenciement pour motif économique une convention de reclassement personnalisé. (Article L1233-65 )

Cette convention et les explications relatives à son application se trouvent sur le site du Ministère du travail sous le lien suivant :
www.travail-solidarite.gouv.fr/informations-pratiques/fiches…/convention-reclassement-personnalise-crp.html –

Le Code du Travail précise que « cette convention lui permet de bénéficier, après la rupture de son contrat de travail, d’actions de soutien psychologique, d’orientation, d’accompagnement, d’évaluation des compétences professionnelles et de formation destinées à favoriser son reclassement. «

Le contrat est réputé rompu d’un commun accord si le salarié accepte la CRP ce qui a des effets particuliers sur la rupture du contrat.

L’Article L1233-67 dispose que Si le salarié accepte la convention de reclassement personnalisé, le contrat de travail est réputé rompu du commun accord des parties.
Cette rupture du contrat de travail, qui ne comporte ni préavis ni indemnité de préavis, ouvre droit à l’indemnité de licenciement prévue à l’article L. 1234-9 ainsi que, le cas échéant, au solde de ce qu’aurait été l’indemnité de préavis si elle avait correspondu à une durée supérieure à deux mois.
Le salarié, dont la durée légale du préavis est inférieure à deux mois, perçoit dès la rupture du contrat de travail une somme d’un montant équivalent à l’indemnité de préavis qu’il aurait perçue en cas de refus.
Les régimes social et fiscal applicables à ces sommes sont ceux applicables au préavis.
Pendant l’exécution de la convention de reclassement personnalisé, le salarié est placé sous le statut de stagiaire de la formation professionnelle.

A l’issue du contrat, après le licenciement, des documents doivent être remis par l’employeur au salarié :

– Un Certificat de travail.
Article L1234-19

A l’expiration du contrat de travail, l’employeur délivre au salarié un certificat dont le contenu est déterminé par voie réglementaire.

– Un Reçu pour solde de tout compte qui devient libératoire pour l’employeur après 6 mois suivant sa signature.

Article L1234-20
Le solde de tout compte, établi par l’employeur et dont le salarié lui donne reçu, fait l’inventaire des sommes versées au salarié lors de la rupture du contrat de travail.
Le reçu pour solde de tout compte peut être dénoncé dans les six mois qui suivent sa signature, délai au-delà duquel il devient libératoire pour l’employeur pour les sommes qui y sont mentionnées.

Contestations et sanctions des irrégularités du licenciement

Une procedure irrégulière, un licenciement sans cause réelle ni sérieuse, un licenciement jugé nul, la non proposition de la CRP, exposent l’employeur à diverses sanctions.

Les règles posées par le Code du travail sont les suivantes :

Article L1235-1
En cas de litige, le juge, à qui il appartient d’apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l’employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties après avoir ordonné, au besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles.
Si un doute subsiste, il profite au salarié.

Article L1235-2 (sanction seulement applicable, sauf exception prevue par l’article L 1235-5, si le salarié à plus de 2 années d’ancienneté et si l’entreprise à plus de 11 salariés)
Si le licenciement d’un salarié survient sans que la procédure requise ait été observée, mais pour une cause réelle et sérieuse, le juge impose à l’employeur d’accomplir la procédure prévue et accorde au salarié, à la charge de l’employeur, une indemnité qui ne peut être supérieure à un mois de salaire.

Article L1235-3 (sanction seulement applicable, sauf exception prevue par l’article L 1235-5, si le salarié à plus de 2 années d’ancienneté et si l’entreprise à plus de 11 salariés)

Si le licenciement d’un salarié survient pour une cause qui n’est pas réelle et sérieuse, le juge peut proposer la réintégration du salarié dans l’entreprise, avec maintien de ses avantages acquis.
Si l’une ou l’autre des parties refuse, le juge octroie une indemnité au salarié. Cette indemnité, à la charge de l’employeur, ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois. Elle est due sans préjudice, le cas échéant, de l’indemnité de licenciement prévue à l’article L. 1234-9.

(L’article L.1234-9 sur l’indemnité légale de licenciement dispose que :
Le salarié titulaire d’un contrat de travail à durée indéterminée, licencié alors qu’il compte une année d’ancienneté ininterrompue au service du même employeur, a droit, sauf en cas de faute grave, à une indemnité de licenciement.
Les modalités de calcul de cette indemnité sont fonction de la rémunération brute dont le salarié bénéficiait antérieurement à la rupture du contrat de travail. Ce taux et ces modalités sont déterminés par voie réglementaire).

Attention ! la sanction d’un licenciement peut être aussi le remboursement des indemnités ASSEDICS versées au salarié.

Article L1235-4 (sanction seulement applicable, sauf exception prevue par l’article L 1235-5, si le salarié à plus de 2 années d’ancienneté et si l’entreprise à plus de 11 salariés).

Dans les cas prévus aux articles L. 1235-3 et L. 1235-11, le juge ordonne le remboursement par l’employeur fautif aux organismes intéressés de tout ou partie des indemnités de chômage versées au salarié licencié, du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé, dans la limite de six mois d’indemnités de chômage par salarié intéressé.
Ce remboursement est ordonné d’office lorsque les organismes intéressés ne sont pas intervenus à l’instance ou n’ont pas fait connaître le montant des indemnités versées.

Article L1235-5
Ne sont pas applicables au licenciement d’un salarié de moins de deux ans d’ancienneté dans l’entreprise et au licenciement opéré dans une entreprise employant habituellement moins de onze salariés, les dispositions relatives :
1° Aux irrégularités de procédure, prévues à l’article L. 1235-2 ;
2° A l’absence de cause réelle et sérieuse, prévues à l’article L. 1235-3 ;
3° Au remboursement des indemnités de chômage, prévues à l’article L. 1235-4.
Le salarié peut prétendre, en cas de licenciement abusif, à une indemnité correspondant au préjudice subi.
Toutefois, en cas de méconnaissance des dispositions des articles L. 1232-4 et L. 1233-13, relatives à l’assistance du salarié par un conseiller, les dispositions relatives aux irrégularités de procédure prévues à l’article L. 1235-2 s’appliquent même au licenciement d’un salarié ayant moins de deux ans d’ancienneté et au licenciement opéré dans une entreprise employant habituellement moins de onze salariés.

Article L1235-13 (sanction seulement applicable, si le salarié à plus de 2 années d’ancienneté et si l’entreprise à plus de 11 salariés).

En cas de non-respect de la priorité de réembauche prévue à l’article L. 1233-45, le juge accorde au salarié une indemnité qui ne peut être inférieure à deux mois de salaire.

La non proposition de la Convention de reclassement personnalisée expose aussi l’employeur à des sanctions :

Article L1235-16
Tout employeur non soumis aux dispositions de l’article L. 1233-71, qui procède au licenciement pour motif économique d’un salarié sans lui proposer le bénéfice d’une convention de reclassement personnalisé, verse à l’institution mentionnée à l’article L. 5312-1 une contribution égale à deux mois de salaire brut moyen, calculé sur la base des douze derniers mois travaillés.

Maître Yann Pedler – Fiche pratique SNEG Licenciement individuel pour motif économique – octobre 2008