Municipales 2020 : rencontre avec Raphaëlle Rémy-Leleu

Le SNEG — 21 février 2020

De gauche à droite : Rémi Calmon, directeur exécutif du SNEG & Co, Frédéric Badina, candidat dans le 18ème, Raphaëlle Rémy-Leleu, tête de liste EELV de Paris Centre, Olivier Robert, président et Julien Gamber, adhérent du SNEG & Co.

Le SNEG & Co rencontre les candidats aux élections municipales qui se tiendront les 15 et 22 mars prochain. A chacun, nous posons les même questions autour des thèmes qui nous concernent : préservation du tissu commercial LGBT, relations commerces-riverains, terrasses,  spéculation immobilière, police municipale, insécurité, transports, circulation, stationnement…

Raphaëlle Rémy-Leleu est tête de liste EELV de Paris Centre pour la liste « L’écologie pour Paris » menée par David Belliard, candidat dans le 11ème.

Préservation du tissu économique LGBT : le centre de Paris est victime d’une « disneylandisation ». Cela signifie un tissu commercial qui profite moins au habitants avec le développement d’enseignes de chaînes au détriment des petits lieux traditionnels. C’est pourtant à travers eux qu’existe notre patrimoine, il faut adopter une politique qui permette de préserver et de développer les lieux commerciaux, culturels. Cela passe par Paris Commerces (GIE qui regroupe les trois bailleurs sociaux de la Ville de Paris, ndlr) et l’extension du dispositif de La Semaset. C’est un outil pivot, qui doit être protégée car elle a été menacée ces dernières années mais qui ne peut jusqu’à présent qu’agir sur les murs et non sur les baux. La loi permet d’étendre la préemption sur le tout Paris. Il constituer une réserve d’analyse foncière et financière pour préempter, trouver de nouveaux leviers fiscaux vis-à-vis des grandes enseignes qui s’installent. Nous devons accroître notre vigilance, par exemple sur la possibilité de transformer des beaux commerciaux de rez-de-chaussée en location saisonnière. La répartition des compétences entre maire, préfecture, région est à revoir. Actuellement, tout est trop morcelé et rien ne permet de faire avancer les choses. Or, qui connaît le mieux le tissu économique de son quartier que le maire d’arrondissement ? Il faut donc relocaliser le pouvoir de décision, renforcer sa puissance de plaidoyer.

Spéculation immobilière : les prix du m2, des baux commerciaux sont de plus en plus haut. Il existe une triple problématique : passer d’une communauté de résistance à une intégration de droit, défendre le commerce local contre l’homogénéisation, trouver l’articulation entre préservation du commerce local et changement de destination sous couvert d’attractivité. Les acteurs actuels ont une belle part de responsabilité du constat que l’on peut établir. Il faut changer de discours sur la ville dite attractive et ce n’est certainement pas une galerie d’aéroport dans les rues qui convient. A terme, ça ne peut même que nuire. On est parfois un peu timorés sur le sujet, il faut réviser le PLU (Plan Local d’Urbanisme, ndlr) en créant des zones de protection du patrimoine et de l’artisanat. Face au risque d’hyper tourisme, il faut lutter contre l’artificialisation, élargir le champ aux lieux de patrimoine.

Terrasses chauffées : la fille du Nord que je suis a toujours trop chaud à Paris même en hiver ! A Amsterdam par exemple, il n’y a pas de terrasses chauffées et ça se passe très bien. C’est un changement de mode de vie et si on ne le fait pas, on va aboutir au pire. Chauffer la rue est la pire manière de dépenser de l’énergie et je m’interroge d’ailleurs sur les ratios économiques même si je ne veux pas opposer écologie et économie, nous sommes bien certains des enjeux. Il reste beaucoup de fumeurs et l’interdiction aura un effet sur la pratique des consommateurs. L’accompagnement des professionnels est indispensable. Il faut voir ce sujet avec méthode. Le pire serait de mettre en place les évolutions écologiques sur un claquement de doigt. Je ne crois pas en l’écologie punitive sur des questions économiques. Récupérer les données des Pays-Bas, d’Allemagne et de Rennes bien sûr est une première étape. Trouver des commerces volontaires pour une expérimentation et une étude micro en est une autre. Il existe des voies de transformation à étudier, comme les terrasses fermées. Nous nous donnerons le temps nécessaire, dans la lutte contre le gaspillage d’énergie, les terrasses ne sont pas une priorité.

Relations voisinage : nous rajouterons des lieux de rencontre, des conseils de quartiers pour un mieux disant démocratique pour créer du lien avec l’administration et donner un pouvoir de saisine au conseil d’arrondissement. Les mairies sous estiment le pouvoir de médiation qu’elles peuvent mener entre commerçants et riverains. Il existe un  effet loupe anxiogène sur les nuisances : une seule fait l’effet de quinze. Il faut une objectivisation de la nuisance réelle. Elle est certainement une réalité pour ceux qui sont en proximité immédiate. Les gens ne nous parlent pas des bars, il nous parle des scooters. Les établissements ne sont pas non plus responsables de la pollution lumineuse. Pour les nuisances sonores, avec un fonds d’aides, la mairie peut participer au plan de renouvellement technique thermique et du même coup sonore pour isoler les logements. A l’origine c’est une compétence de région qui a été récupérée par les départements.

Rainbow flag : je trouve ça très bien, ça fait vivre un quartier, met en valeur l’espace public. Je connais les oppositions mais je crois que ça ne fait de mal à personne et du bien à beaucoup. La mairie a profité de ce dispositif pour se valoriser auprès d’une communauté ; le symbole c’est bien mais ce n’est pas une politique, ça ne dissimule pas le reste qui n’est pas fait.

Politique de la nuit : la principale question qui se pose la nuit, c’est celle de la sécurité, pour que la nuit soit accessible à tous. Il y a un gros effort à faire sur le sujet comme par exemple, les arrêts de bus à la demande, la mise à disposition de lieux de médiation, de prise de parole et de dépôt de plainte. Pour un Paris friendly, il y a un effet de signal à donner avec des infrastructures à créer comme un centre culturel et d’archives, une plaque mémorielle pour les personnes déportées. Les commerces en bénéficieront. Pour ce qui est de la réimplantation de lieux commerciaux et festifs, il faut trouver une valorisation de certains secteurs, travailler avec l’Office de Tourisme, avec vous organisation professionnelle sur des événementiels, des parcours d’attractivité. On ne fera pas de Paris une capitale de la night en deux temps au regard de la spéculation immobilière et de la densité de population mais on peut inventer un modèle spécifique, imaginer des lieux temporaires, le tout en collaboration avec la Préfecture de Police.

Police de la ville : sur ce sujet, nous assistons en ce moment un jeu d’acteurs délétère qui ne se fait pas au profit des parisiens. Il n’y a pas de dialogue, pas de recul, juste une forte verbalisation des commerçants, sans discernement, qui masque le manque d’interventions pour le reste. Nous ne souhaitons pas une police municipale mais une brigade de sécurité et de tranquillité publique en charge des infractions, y compris dans les parcs et jardins où il se passe pas mal de choses. Je refuse de parler d’incivilités car ce terme n’existe pas dans le Code pénal. Nous devons remettre des agents dans la rue, qui auront reçu une formation spécifique. Ils ne seront pas armés, ce n’est pas le même métier et ça produit un effet anxiogène. Les armes sont réservées à la police nationale, ça fait partie d’une politique cohérente sur le territoire.

Insécurité : les chiffres évoquent + 13,5 % de délinquance, notamment des voies de fait, d’agressions avec violences. Nous devons rétablir de vrais échanges avec la Préfecture de Police qui elle, doit récupérer et repacifier l’espace public. Il y a un manque d’effectifs de la police nationale à récupérer par des leviers politiques mais aussi le problème des agents qui sont éloignés du cœur de leur mission que sont les crimes et les délits, des policiers en début de carrière, inexpérimentés et qui pour beaucoup, ne pensent qu’à quitter le territoire parisien.

Circulation et stationnement : la compétence est celle de la RATP et de la région. Nous connaissons la demande d’une ouverture du métro la nuit mais il faut prendre en compte le facteur pénibilité. Nous attendons de connaître le résultat des ouvertures de nuit du métro. Sur la circulation des voitures qui représente 50 % de l’espace public, nous pensons notamment à optimiser les parkings souterrains, négocier avec les opérateurs de trottinettes et optimiser la logistique du dernier kilomètre à vélo. Il faut accompagner la mobilité notamment pour les livraisons des commerçants. Le stationnement des deux roues pose une grande question, ils occupent une grande place sur l’espace public, surtout avec les opérateurs de free floating, un principe de tarification du stationnement serait légitime.

« Message » aux LGBT : j’aurai tellement à dire !