Pas de gondoles pour Denise : 30 ans de Caramels

Le SNEG vous recommande, Scènes — 18 juin 2012

Dans le paysage des comédies musicales, il est une troupe qui fait figure d’OVNI : Les Caramels Fous. Cette chorale exclusivement masculine (sur scène tout au moins), créée il y a près de 30 ans, présente aujourd’hui sa 13ème création « Pas de gondoles pour Denise ». La spécialité de la troupe : le pastiche, la parodie… et l’humour avant tout. Là où le précédent spectacle (« Madame Mouchabeurre ») suivait une histoire originale racontée du début à la fin, ce nouveau cru se présente sous la forme de revue, une suite de différents tableaux, présentant une galerie de personnages tous plus invraisemblables les uns que les autres, à la fois tellement clichés et tellement drôles, tous en quête d’amour. Un fil conducteur relie néanmoins toutes ces histoires: Denise, lesbienne désabusée, spectatrice et commentatrice cynique de toutes ces allées et venues, qui aura droit, ou non, à son happy end en gondoles.
Pour mieux illustrer et servir ce scénario, l’auteur, Michel Heim, a sélectionné près de 40 chansons, plus ou moins connues, plus ou moins récentes, dans des univers musicaux très variés tels que l’opéra, le disco, la pop, la variété française et bien sûr la comédie musicale. Réécrivant les paroles de ces titres, il fait preuve de créativité, d’originalité, d’insolence et d’effronterie, n’ayant pas peur d’un vocabulaire souvent très salace même si la bienséance se substitue parfois à la rime obscène attendue. La modernité (« lol ») se mêle aux vieux clichés dans un spectacle gay-friendly qui dégomme sans ménagement les moindres travers de tout ce petit monde.
Parmi ces titres et ces tableaux, il est des scènes à retenir. On assiste ainsi à une reconstitution quasi à l’identique du clip « Womanizer » de Britney Spears avec une performance scénique des plus réussie. Il y a aussi cette reprise de la scène culte du « Cell Block Tango » de la comédie musicale « Chicago » qui a du demander de la part de ces comédiens « amateurs » un énorme travail vocal et de mise en scène. Outre ces exemples, on traverse une multitude de décors et de cadres allant de l’aéroport d’Orly à un institut de beauté, d’un hammam à un palace ou d’un plateau de télévision à une église, mais faisant aussi référence ici et là au Marais (spectacle gay-friendly oblige) et à bons nombres de références similaires. Dans ces décors évoluent des personnages en burqa, en kippa, en toge ou en bas-résille, et c’est non sans humour et dérision que sont abordés des sujets politiques et de société.
Rappelons que cette troupe des Caramels Fous n’est pas constituée de comédiens, chanteurs, ou danseurs professionnels. Ces bénévoles jouent pour le plaisir, en parallèle de leur activité principale respective. Mais loin de se laisser aller à l’amateurisme, ces « artistes » font preuve d’un professionnalisme épatant, jouant, chantant et dansant avec une belle énergie. De ce fait, on leur passera avec indulgence l’utilisation de bandes musicales version karaoké sur lesquelles ils chantent et de costumes « low-cost », mais résolument voulus, dans l’esprit parodique et convivial du spectacle, convivialité qu’il parviennent à transmettre au public.
Drôle, cynique et décalé, « Pas de gondoles pour Denise » est sans conteste un spectacle où le professionnalisme des comédiens dont ce n’est pas le métier apporte une touche de fraîcheur et de convivialité qui rend le tout très appréciable, mais néanmoins pas autant que l’avais été « Madame Mouchabeurre » en 2010.
Pour le SNEG, Duarte http://duartelittle.skyrock.com
« Pas de gondoles pour Denise » au Théâtre du Gymnase Marie Bell, 38 boulevard Bonne Nouvelle 10è, du jeudi au samedi du 7 au 23 juin 2012 et du 27 au 29 septembre 2012. Places de 11 à 50 €. Réservations au 01 42 46 79 79.